Château de sable à la Marsa

Château de sable à la Marsa

2016 – 2020. En quatre ans, à l’égard de la finance digitale, la Tunisie est passée de la méfiance à la promotion. Le 30 novembre 2016, en marge de la conférence pour l’investissement - Tunisie 2020, la délégation de Winstant Network présenta ses produits de finance digitale au conseiller principal du Premier Ministre qui ignorait alors tout de cette industrie. Le 9 juin 2020, la Banque centrale de Tunisie lançait un site web dédié aux Fintechs.

Entre ces deux dates, la Tunisie, pays du bassin méditerranéen entre l’Afrique et l’Europe aux multiples influences culturelles, s’est ouverte à l’industrie numérique. En 2016, associée aux crypto-monnaies la finance digitale suscitait doutes et méfiance, même si la Blockchain commençait à susciter l’intérêt de la société civile comme levier de croissance et de changement du secteur bancaire.

Comme toujours, l’innovation a besoin de pionniers qui utilisent les moyens adaptés pour convaincre une société. En 2017, nous avions rencontré l’un d’entre eux. Moez Chakchouk, PDG de la Poste de 2015 à 2018, venait de lancer le wallet Digicash. Avec lui nous avions envisagé l’intégration de Digicash et de WinstantPay.

Le haut fonctionnaire nous fit part de nombreux projets de finance digitale : inclusion financière des plus démunis, attraction des investisseurs en Tunisie, convertibilité des monnaies pour faciliter le commerce intra-maghrébin. Un peu plus tard, ConsenSys lança une innovation pour l’échange entre Dirhams marocains et Dinars tunisiens en quelques secondes.

En 2017 et 2018, la présentation du wallet WinstantPay aux cadres de la Banque centrale de Tunisie suscita l’intérêt. En matière de finance digitale, cette institution a toujours été à la pointe de l’innovation : vérificateur de chèques par la technologie, stratégies de decashing pour enrayer les transactions en liquide et les échanges illégaux tout en favorisant l’inclusion financière.

Les projets de finance digitale se développèrent grâce à un autre pionnier. Professeur d’économie, coordonnateur du programme Libye à la Banque mondiale, Marouane Abassi est nommé gouverneur de la Banque centralede Tunisie (BCT),le 16 février 2018.

Progressivement, l’établissement régulateur de la finance tunisienne va chercher à se mettre en conformité avec les exigences du marché financier moderne. Ses objectifs sont de garantir l’inclusion et l’innovation financière et de changer le modèle bancaire en allant vers la digitalisation.

En décembre 2019, la BCT annonçait plusieurs mesures pour promouvoir l’innovation et la technologie dans le secteur bancaire et financier : sandbox réglementaire, comité BCT-Fintech, site web sur les technologies financières, BCT-Lab, adresse mail dédiée à l’écosystème.

Le 21 janvier 2020, la BCT procédait au lancement officiel du sandbox réglementaire afin de tester les solutions innovantes à petite échelle et avec des clients volontaires. L’initiative est alors une chance pour les 200 Fintechs labellisées invitées à tester leurs solutions tout en intégrant les exigences réglementaires pour offrir des services financiers adaptés aux besoins du marché.

Dans ce contexte, le gouverneur annonce pour 2020 le lancement d’une nouvelle solution de paiement international et l’ouverture d’une banque entièrement numérique sans agences. Le sandbox est appuyé par la Banque mondiale qui promeut le paiement digital comme moyen d’inclusion financière. Jusqu’à ce 9 juin, où la BCT lance officiellement le site web dont l’objectif est d’accompagner les Fintechs tunisiennes dans le développement de leurs solutions.

Comment et à quelles conditions ces nouveaux acteurs peuvent-ils promouvoir la finance digitale dans un pays particulièrement scrupuleux avec les transactions financières internationales ?

En 2018, Deloitte publiait une étude[1]qui permet de saisir et analyser la stratégie de la BCT à l’égard des Fintechs. Deux statistiques retiennent l’attention. En 2018, le déclin des Fintechs, mais la hausse des investissements dans celles qui fonctionnent, suscite un intérêt pour étudier les conditions d’un rapprochement entre les Fintechs, les institutions bancaires traditionnelles et les organismes règlementaires.

Le rapport considère les sandboxes réglementaires, par conséquent l’initiative tunisienne, comme des occasions privilégiées de collaboration entre les parties prenantes de la finance digitale. Le cadre de ces accélérateurs d’innovation Fintech est posé en février 2019 par le rapport de United Nations Secretary General’s Special Advocate for inclusive finance for development (UNSGSA) évoqué par la Banque de France [2].

Le rapport note le fort potentiel des acteurs et technologies Fintech pour favoriser l’inclusion financière : paiement mobile, le prêt entre pairs (P2P lending), notation de crédits (credit scoring) alternative, nouvelles formes d’épargne et d’assurance.

Trois dispositifs de soutien réglementaires aux acteurs Fintech, mis en place par les autorités de régulation, sont analysés : les Innovation offices- bureaux d’innovation, les RegulatorySandboxes– bacs à sable réglementaires et les RegTech- outils pour la régulation. Quand les bureaux d’étude sont utilisés pour dialoguer avec les porteurs de projets Fintech, de création plus récente, les RegTech étudient les questions de conformité règlementaire. Destinés à tester de nouveaux services en conditions réelles, les sandboxes bénéficient d’un encadrement spécifique.

Le rapport des Nations Unies relativise l’apport des sandboxes réglementaires qui ne sont pas la meilleure solutionpour réglementer les FinTechs inclusives. Elles ne remplacent pas les acteurs expérimentés de la finance digitale qui sont plus capables de conseiller les organismes de régulation.

L’analyse du sandbox règlementaire du Royaume-Uni relativise cette conclusion et propose des solutions de collaboration entre Fintechs et institutions financières[3]. Au sommet mondial Innovate Finance 2016, Lawrence Wintermeyer s’interrogeait sur la manière dont un organisme de réglementation crée un sandbox donnant à l'industrie la liberté d’innover et d'encourager des solutions créatives.

Ces initiatives sont face à deux défis : l’abaissement des obstacles aux tests dans le cadre réglementaire existant et la garantie de l’absence de transfert aux consommateurs des risques liés aux tests de nouvelles solutions. En précisant les critères d’éligibilité, les entreprises sont choisies en fonction de la faisabilité des tests. Ainsi, le sandbox peut jouer un rôle important pour aider les entreprises à commercialiser.

Les sandboxes industriels peuvent remédier à certaines insuffisances de leurs équivalentes règlementaires. Mieux que celles-ci, elles peuventaccélérer l'utilisation des connaissances, des données et des technologies dans le processus de développement de solutions innovantes pour les clients. En bref, elles accélèrent la mise sur le marché.

Cette accélération suppose de réunir un ensemble de parties prenantes et de compétences autour de la même table. Trois stratégies s’y affrontent. S’agit-il de réussir un test dans un environnement confidentiel ? Ou plutôt d’apprécier la vitesse et la réussite de la mise sur le marché. S’agit-il enfin, d’ouvrir denouveaux marchés aux produits qui ont fait leurs preuves à des prix concurrentiels.

Issus des retours d’expérience, les ingrédients basiques du succès sont résumés en trois mots. POC : la relation entre les ressources requises, la durée du processus et les Proof's of Concept ou « POC » pour les startups et les organisations qui les encadrent. Collaboration : la relation entre les ressources requises, la duréedu processus et le développement de collaborations de participants pour résoudre desdéfis communs. Demande : Après avoir regardé de loin les Fintechs, les banques prennent l’innovation au sérieux et demandent maintenant comment elles peuvent institutionnaliser les innovations.

Dorénavant, la collaboration entre les banques et les Fintechs est devenue la question majeure dans l’industrie de la finance digitale. C’est l’enjeu majeur des sandboxes, règlementaire et industrielle, et des accélérateurs de Fintech.

Le rapport[4]Deloitte identifie des cultures différentes. Les Fintech ont la liberté et une culture innovante, mais manquent d’argent et de connaissances du secteur industriel quand les institutions financières ont l’argent et l’expertise, mais sont handicapées par des systèmes anciens des organisations lourdes. Ces différences culturelles sont à l’origine des deux types d’obstacles à une collaboration efficace.

Les obstacles sont relatifs à la valeur attribuée aux solutions proposées par les Fintech. Souvent, les propositions trop génériques des Fintechs sont insuffisantes pour satisfaire la demande de solutions spécifiques à l'industrie. Par ailleurs, les institutions financières peinent à définir leurs attentes quantitatives et qualitatives à l’égard des succès attendus des intiatives des Fintech.

Les obstacles sont aussi relatifs aux contraintes organisationnelles. Pour peu qu’elles deviennent partenaires des institutions financières, les Fintechs sont limitées par la structure et la gouvernance qui retardent l'expérimentation. Enfin, le cloisonnement des institutions financières empêche les Fintechs de mettre en œuvre des initiatives.

A l’avenir, il est probable que la collaboration puisse se développer et s’accélèrer entre les acteurs novateurs et les acteurs historiques pour peu qu’ils saisissent cinq opportunités.

1. Si à l’avenir, les institutions financières sont susceptibles de collaborer plus que de rivaliser avec les Fintechs, elles peinent souvent à interagir efficacement avec le monde des Fintech, plus rapide et moins structuré.
2. Les acteurs historiques peinent à définir des procédures claires pour approuver et développer des technologies de pointe et à établir des repères pour mesurer leur efficacité.
3. Pour surmonter ces barrières, les acteurs historiques devraient mieux définir les procédures de succès ou d’échec lors de l’expérimentation des technologies.
4. De leur côté, les Fintechs doivent redéfinir leurs arguments et leurs produits pour s'aligner sur les défis du monde réel et faire preuve d'une expertise industrielle et technique.
5. À l'avenir, la consolidation de la collaboration est probable car les Fintechs sont à la recherche de partenariats solides dans un marché de plus en plus concurrentiel et les institutions financières recherchent des partenaires plus innovants.

A propos de cette collaboration, une banque australienne a imaginé un scénario façon BigTech : «Il existe des centaines de Fintechs offrant des services similaires, et l'une d'entre elles finira par les engloutir toutes, puis sera à son tour engloutie par une banque.»[5]

En attendant cette issue funeste pour la diversité, revenons à la Tunisie en imaginant le scénario d’une collaboration plus locale. Supposons que les Fintechs n’y cherchent pas à perturber les banques mais à les alimenter en solutions novatrices et efficaces centrées sur l’inclusion financière et une meilleure expérience client. Supposons qu’il y soit possible de négocier, de créer et de mettre en œuvre des modèles commerciaux complémentaires.

Alors, notre réseau Winstant Network est prêt à assister les institutions financières, les Fintechs, les accélérateurs Fintechs, les sandboxes réglementaire et industrielles, les bureaux d’innovation et les RegTech à s’inscrire dans cette dynamique de collaboration.

Au service des institutions financières de toutes tailles depuis 18 ans, Winstant network est compétent pour fournir conseils et produits sur les services financiers, le développement de logiciels et le support commercial que ce soit pour la numérisation des banques avec Trade Solutions Group, les wallets instantanés en toute monnaie avec WinstantPay et la conformité avec WorldKYC. Sans compter nos produits VO2 Tech et Tap and Trace qui favorisent l’inclusion financière et la distanciation physique anti-COVID 19.

Winstant Network est lepremier réseau mondial décentralisé de compensation qui apportedes réponses simples à des problèmes financiers complexes pour les banques, les petites et moyennes entreprises, les passerelles de paiement, les institutions financières, les Fintechs, les accélérateurs de Fintech, les sandboxes réglementaires et industriels.

Il faut apprendre à jouer dans les sandboxes avec autant d’agilité que les enfants contruisent des châteaux de sable sur la plage de la Marsa.

GILLES KLEIN - Managing Director Europe - Africa

[1]Smith, K. S., Eckenrode J., 2018, Closing the gap in fintech collaboration, overcoming obstacles to a symbiotic relationship, https://bit.ly/37Nwtlz
[2]ACPR, Banque de France, 2019, Une Sandboxréglementair – bac à sable réglementaire – pour quoi faire ? https://bit.ly/2zTSKlo
[3]Skinner, C. (2017) Money Sandboxes Research, https://bit.ly/3dfyacI
[4]Deloitte Center for Financial Services, 2018, Closing the gap in Fintech collaboration, Overcoming obstacles to a symbiotic relationship https://bit.ly/2AYtA5o
[5]Ibid, Deloitte Center for Financial Services, 2018, Closing the gap in Fintech collaboration, Overcoming obstacles to a symbiotic relationship https://bit.ly/2AYtA5o